Centre Culturel Elsa Triolet rue Charles Nédélec 13110 Port de Bouc Chypre d'hier et d'aujourd'hui      Située au carrefour de trois continents et de grandes civilisations, Chypre est devenue, elle aussi, le berceau d'une civilisation millénaire, assimilant les diverses influences qu'elle a subies; elle demeure un centre de culture grecque avec des traits particuliers. L'île d'Aphrodite et sa culture, qui ont survécu à une foule de conquérants, voient leur existence menacée aujourd'hui par le déracinement brutal de son peuple et la partition imposés par les troupes de la Turquie qui ont envahi et occupent, depuis 1974, 35% de son territoire. Chypre raconte ici son histoire et le drame vécu par son peuple, elle vous demande de joindre votre voix à la sienne pour que son patrimoine culturel millénaire soit préservé et que ses habitants puissent vivre en paix et en prospérité dans un pays uni.     HISTOIRE Chypre a l'une des plus anciennes histoires du monde. Les premières traces de civilisation remontent à 11.000 ans. L'archéologie de Chypre a suscité au cours de ces dernières années l'intérêt des archéologues du monde entier. La découverte du cuivre dans l'île, à l'époque chalcolithique, a apporté la richesse et développé le commerce dans l'île. Habitée par les Mycéniens et les Achéens au XIe siècle avant J.C., Chypre s'est transformée en un centre florissant de civilisation grecque. A cause de sa position stratégique et de ses richesses naturelles, Chypre a été envahie par diverses nations. Elle a néanmoins réussi à maintenir sa langue et sa culture intactes. Homère et  d'autres poètes grecs anciens, ainsi que des philosophes, se référaient souvent à l'île de Chypre, exprimant leur admiration pour sa culture. Au moment du partage de l'Empire d'Alexandre le Grand, Chypre est devenue rime des parties les plus importantes du royaume des Plolémées d'Egypte. En 30 avant J.C., l'île est passée sous la domination des Romains. Le sanctuaire d'Aphrodite à Faphos était, aussi bien sous le règne des Ptolémées que sous celui des Romains, le centre de la vie religieuse et culturelle de l'île. Lors de la division de l'Empire romain en 330 après J.C., Chypre est devenue une province de l'empire byzantin St. Paul et St. Barnabé, natif de Salamine et fondateur de l'Eglise de chypre, ont introduit le christianisme dans l'île, au 1er siècle après J.C. Les siècles de civilisation byzantine à Chypre ont laissé à l'île un héritage riche en art et en architecture. Pendant l'époque des Croisades, Chypre a été conquise par Richard Coeur de Lion. Plus tard, l'île a été gouvernée par les Lusignan et les Vénitiens. En 1571, les Ottomans ont envahi Chypre.  La période de domination ottomane a permis aux Turcs de s'établir dans l'île. Ces derniers étaient des membres de l'armée ottomane. Des chrétiens s'étaient également convertis à l'islam. Ainsi, avec le temps, une population native de Chypriotes turcs s'est formée à Chypre, leur nombre s'élevant à 18% de la population lors du recensement de 1960. Pendant la période ottomane, les chypriotes grecs et les chypriotes turcs ont lutté ensemble, à plusieurs reprise contre la domination ottomane qui était oppressive. Cette lutte commune a duré jusqu'à la fin de la domination ottomane, à savoir 1878, date à laquelle Chypre a été donnée en bail à la Grande-Bretagne par le sultan. PROBLEMES APRES L'INDEPENDANCE Quelques dispositions de la Constitution, comme celle du droit de veto accordé au vice-président et aux députés chypriotes turcs sur des questions d'impôts, ont créé des difficultés empêchant le bon fonctionnement de l'Etat. Ainsi, en novembre 1963, le président de la République, l'archevêque Makarios, a proposé aux dirigeants de la communauté chypriote turque une série d'amendements à la Constitution. La Turquie, répondant à la place des Chypriotes turcs, a rejeté les propositions. Au lieu de discuter ces propositions, les Chypriotes turcs ont manigancé une crise intercommunautaire, se sont retirés du Gouvernement et du Parlement et ont établi des enclaves militaires à Nicosie et dans d'autres parties de l'île, à l'aide de militaires venus de Turquie. POSITION DE LA TURQUIE - PROJETS POUR DIVISER L'ILE La Turquie, en tant qu'Etat succédant à l'Empire ottoman, avait renoncé, par le Traité de Lausanne en 1923, à toutes ses revendications sur Chypre. Malgré ce traité, les différents gouvernements turcs successifs ont commencé dans les années 1950 à avoir des revendications sur Chypre. Dans les années 1960, ces revendications sont devenues des menaces et des actes d'agression contre Chypre. En 1964, le ministre turc des Affaires étrangères de l'époque, Feridun Erkin, a ouvertement déclaré que Chypre était d'une «importance vitale pour la Turquie non seulement à cause de l'existence de la communauté turque dans l'île, mais aussi à cause de sa position géostratégique». Dans une déclaration publique en 1964, Kemal Satir, vice-président de la Turquie soulignait que: «Chypre sera divisée en deux parties dont l'une sera rattachée à la Turquie». EFFORTS DU GOUVERNEMENT CHYPRIOTE: 1964-1973       Malgré les déclarations menaçantes de la Turquie, avec lesquelles les dirigeants chypriotes turcs faisaient cause commune, le gouvernement chypriote a fait tout ce qui était en son pouvoir pour ramener les choses à leur ordre normal. Il a offert aux Chypriotes turcs une charte stipulant des droits de minorité. Celle-ci avait été rédigée avec l'aide des Nations unies; de plus, il a encouragé économiquement les Chypriotes turcs, qui avaient été forcés par leurs dirigeants de s'installer dans les régions turques enclavées militairement, à retourner dans leurs foyers et, en 1968, il a entamé des négociations inter­communautaires avec les dirigeants chypriotes turcs en vue d'un règlement négocié d'une nouveau système constitutionnel à Chypre. Mais malheureusement, le pouvoir des dirigeants chypriotes turcs séparatistes sur la population chypriote turque était aussi puissant que leur détermination de soutenir la visée de la Turquie de diviser Chypre. Le Secrétaire général de l'ONU décrivait, en 1965, la politique des dirigeants chypriotes turcs comme suit: «Les dirigeants chypriotes turcs ont adhéré à une prise de position rigide vis-à-vis de toute mesure qui pourrait impliquer que des membres des deux communautés vivent ou travaillent ensemble, ou qui pourrait mettre des Chypriotes turcs dans des situations où ils auraient à reconnaître l'autorité des fonctionnaires du Gouvernement. En effet, puisque les dirigeants chypriotes turcs se sont engagés dans un but politique consistant à séparer physiquement et géographiquement les deux communautés, il est peu probable qu'ils encouragent les Chypriotes turcs dans des activités qui pourraient être interprétées comme faisant preuve des mérites d'une politique intentionnelle d'isolement des Chypriotes turcs». Malgré cette politique, tout est peu à peu rentré dans l'ordre et, en 1974, un très grand nombre de Chypriotes turcs vivaient et travaillaient avec leurs concitoyens Chypriotes grecs. Mais la Turquie attendait le moment propice pour envahir l'île, alors qu'à Chypre, Rauf Denktash demeurait à la tête d'une direction séparatiste chypriote turque. L'INVASION TURQUE DE 1974 Utilisant comme prétexte le coup d'Etat du 15 juillet 1974, fomenté par la junte militaire grecque contre le gouvernement chypriote, la Turquie a enva­hi l'île le 20 juillet 1974. Quarante mille soldats ont débarqué dans l'île, assistés par des forces aériennes et maritimes turques, violant la Charte des Nations unies et tous les principes régissant les relations internationales. Trois jours plus tard, le 23 juillet, à la suite de la chute de la junte militaire grecque, un gouvernement démocratique a été établi en Grèce. Avec la chute de la junte, l'ordre constitutionnel a été également rétabli à Chypre, vu que le gouvernement fantoche mis en place avec le coup d'Etat a été remplacé par un gouvernement légitime dirigé par le président du Parlement de l'époque, Glafcos Clérides. Néanmoins, la Turquie, continuant son agression contre Chypre, a lancé une deuxième offensive le 14 août. Bilan de l'invasion: occupation approximative de 35% du territoire chypriote (les parties les plus riches qui représentent 70% du potentiel économique), déracinement d'un quart de la population chypriote grecque. De plus, des milliers de civils ont été tués, maltraités ou ont disparu sans laisser de traces. De plus, en vue de changer le caractère démographique des régions occupées, la Turquie a fait transférer dans ces régions des colons, venant en grande majorité d'Anatolie (115.000 en 1999). Cela a provoqué l'émigration de la population indigène chypriote turque, réduisant leur nombre de 116.000 (18% avant l'invasion) à 55.000 ou à une minorité de 12%. EFFORTS POUR UNE SOLUTION Le gouvernement chypriote, dans son effort en vue de parvenir à une solution pacifique, a accepté les négociations intercommunautaires, tout en insistant cependant sur le fait qu'elles ne pourraient résoudre que l'aspect interne du problème de Chypre. Le Gouvernement a toujours souligné que l'existence d'un problème beaucoup plus sérieux et international à Chypre, à savoir celui d'une agression et d'une occupation étrangères, nécessitait une prise de position efficace de la part de la communauté internationale, pour que celui-ci soit résolu pacifiquement. Des négociations intercommunautaires entre un représentant de chacune des deux communautés de l'île ont eu lieu depuis des années. Ces efforts ont mené à la signature de deux accords de haut niveau, d'abord celui de février 1977 entre le président Makarios et le dirigeant chypriote turc, Rauf Denktash puis, par la suite, celui de mai 1979 entre le président de l'époque, Spyros Kyprianou et M. Denktash. La partie chypriote grecque et le gouvernement chypriote ont accepté les principes pour une Chypre fédérale, mais ont insisté pour sauvegarder l'unité et l'intégrité du pays, ainsi que les droits de l'homme de tous les citoyens chypriotes, y compris les droits fondamentaux de libre circulation, d'installation et le droit à la propriété. Mais malheureusement, les exigences des séparatistes turcs ont entravé tout progrès dans les négociations intercommunautaires.   DECLARATION DE LADITE «REPUBLIQUE TURQUE DU NORD DE CHYPRE» 1983 En août 1983, le Secrétaire général de l'ONU, encouragé par le gouvernement chypriote, a annoncé sa nouvelle initiative en vue de promouvoir une solution équitable et négociée. Cette initiative, acceptée avec satisfaction par les gouvernements de Chypre et de Grèce, a été rejetée par les dirigeants chypriotes turcs et le gouvernement turc. Par contre, M. Denktash a proposé une rencontre au sommet entre le président Kyprianou et lui-même. Alors que cette rencontre était en voie d'être arrangée par le Représentant spécial de l'ONU à Chypre, le 15 novembre 1983, M. Denktash proclamait ladite "République Turque du Nord de Chypre." Le Conseil de sécurité des Nations unies a été immédiatement convoqué. Il a rejeté et déploré, à une majorité écrasante, la déclaration de «l'Etat» indépendant chypriote turc comme non valide et a invité tous les pays du monde à ne pas reconnaître cette entité illégale. En janvier 1984, le président de la République, M. Kyprianou, a proposé, par l'intermédiaire du Secrétaire général de l'ONU, un cadre de propositions pour une solution globale du problème chypriote. A la suite de nouveaux faits accomplis par l'administration chypriote turque, le Conseil de sécurité a adopté, en mai 1984, la résolution 550 qui condamne l'action sécessionniste du pseudo-Etat chypriote turc et demande son annulation. NEGOCIATIONS INTERCOMMUNAUTAIRES Les négociations intercommunautaires ont repris en septembre 1984 et n'ont duré que jusqu'au mois de décembre de la même année, sans aboutir à des résultats significatifs. Par la suite, de nouveaux tours de négociations ont été convoqués par intervalles, et à différentes époques, par le Secrétaire général de l'ONU. Certaines rencontres étaient directes entre les dirigeants des deux communautés, d'autres indirectes, c'est-à-dire que le Secrétaire général tenait, tour à tour, des rencontres avec chaque partie et communiquait à chacune les points de vue de l'autre partie. Cependant, toutes ces négociations sont demeurées sans résultat concluant. Entre-temps, l'ONU a soumis plusieurs propositions, dans un effort en vue de surmonter l'impasse créée après l'échec de chaque tour de négociations. Chaque fois que la partie chypriote grecque était prête à les examiner, soit la partie chypriote turque rejetait ces propositions, soit elle revenait à la table des négociations avec de nouvelles exigences. Après l'échec du nouveau tour de négociations indirectes en mars 1994, le Secrétaire général de l'ONU, dans son rapport sur Chypre, en date du 30 mai 1994, résume la situation comme suit : «En ce moment, le Conseil de sécurité se trouve face à un scénario familier : une absence d'accord due essentiellement au manque de volonté politique de la partie turque». En décembre 1999, l'ONU s'est embarquée dans un nouvel effort en vue d'un règlement global du problème de Chypre par l'intermédiaire de négociations indirectes qui seraient basées sur les décisions et traités de l'ONU sur Chypre. Cinq tours de négociations ont eu lieu. Les questions discutées concernaient le territoire, la sécurité, la propriété et la distribution des pouvoirs. Cependant, en janvier 2001, juste avant le sixième tour de négociations, M. Denktash déclarait qu'il participerait à un nouveau tour de négociations à condition que le régime illégal dans les régions occupées soit reconnu en tant qu' «Etat souverain» séparé, et qu'il y ait un changement dans la procédure ainsi qu'à la base des négociations mêmes. De plus, méprisant les accords de haut niveau de 1977 et 1979, qui prévoient un règlement fédéral, M. Denktash insistait sur une solution fondée sur une confédération dont les fonctions seraient équivalentes à la partition de l'île. Les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU affirment que tout règlement du problème de Chypre doit assurer un Etat chypriote avec une seule souveraineté et personnalité internationale et une seule citoyenneté, dont l'indépendance et l'intégrité territoriale seront sauvegardées, un Etat qui sera composé de deux communautés égales dans une fédération bicommunautaire et bizonale. Les résolutions affirment de plus qu' «un tel règlement doit ex­clure l'union d'une partie ou de la totalité de Chypre avec tout autre pays, ainsi que toute forme de partage ou de sécession». Il est en général admis qu'un règlement du problème de Chypre se fait attendre depuis longtemps. Mais un règlement équitable et viable ne peut être réaliste que s'il est conforme aux accords de haut niveau de 1977 et 1979, acceptés par les deux parties, et s'il est basé sur les critères objectifs et impartiaux établis par la communauté internationale. Ces critères sont clairement exposés dans les résolutions de l'ONU sur Chypre, le droit international, l'acquis communautaire de l'UE (Chypre y a posé sa candidature d'adhésion en juillet 1990), les décisions de la Cour européenne des Droits de l'homme et de la Charte de l'ONU, et les conventions internationales des Droits de l'homme dont la Turquie est également signataire. Néanmoins, le règlement du problème chypriote n'est pas une condition préalable pour l'adhésion de l'île à l'Union européenne et Chypre espère y adhérer aussitôt après l'achèvement des négociations avec l'UE à la fin de l'an 2002, et à temps pour les élections du Parlement européen de l'an 2004. Ceci a été également réaffirmé dans les conclusions du sommet de l'UE à Helsinki, le 10et 11 décembre 1999. Le gouvernement de Chypre a invité, à maintes reprises, les Chypriotes turcs à participer à la délégation chypriote dépêchée pour les négociations d'adhésion de Chypre à l'UE, étant donné qu'il tient à ce que les Chypriotes turcs profitent également de cette adhésion. Cette proposition, bien que qualifiée de généreuse par l'Union européenne, a été rejetée par M. Denktash qui insiste sur des négociations séparées entre l'UE et son régime illégal dans les régions occupées une position exclue tant par le gouvernement chypriote que par l'UE elle-même. Parallèlement au processus d'adhésion de Chypre à l'UE, qui se déroule de manière satisfaisante, l'ONU poursuit ses efforts pour convoquer des négociations intercommunautaires. La partie chypriote grecque a déjà exprimé son empressement à participer aux négociations et l'on s'attend à ce que la partie chypriote turque y réponde de la sorte. Entre-temps, de nombreux Chypriotes turcs expriment ouvertement leur opposition à la politique d'Ankara et à celle de M. Denktash par le biais de manifestations massives et de marches de protestation en faveur d'une Chypre unie, fédérale et pacifique.     Centre Culturel Elsa Triolet rue Charles Nédélec 13110 Port de Bouc