Centre Culturel Elsa Triolet rue Charles Nédélec 13110 Port de Bouc L'une des conséquences les plus tragiques et sans doute irrémédiables de l'invasion et de l'occupation turques de Chypre est la destruction systématique du patrimoine culturel. En 1974, la Turquie a envahi Chypre, a conquis par la force des armes 35% du territoire de l'île, a chassé un quart de la population, elle a imposé le partage artificiel de l'île qu'elle maintient par son armée qui compte plus de 35.000 hommes. Cette armée empêche les Chypriotes grecs d'avoir accès à la partie nord occupée. De ce fait, les monuments historiques et archéologiques qui se trouvent dans les régions occupées sont à la merci de l'envahisseur. Après tant d'années, le but de la Turquie est très clair comme l'a constaté dès 1976 le journaliste britannique J.Fielding: «Le vandalisme et la profanation sont si méthodiques et si répandus qu'ils correspondent à l'anéantissement de tout ce qui est sacré pour les Grecs».  Ceci est mentionné dans l'article de J. Fielding «Le viol du nord de Chypre» paru dans le journal The Guardian le 6.5.1976, après une visite de ce dernier dans la partie occupée.  Le Patrimoine En 1990, le byzantiniste allemand Klaus Gallas a effectué un voyage enquête dans la partie occupée de Chypre et a examiné l'état des monuments historiques en accordant une attention toute particulière aux monuments chrétiens. Malheureusement, ses constatations parues dans le journal Frankfurter Allgemeine le 30.3.1990 sont tout aussi tragiques. Un des cas décrits est l'odyssée des mosaïques de Kanakaria. Les quatre mosaïques, qui avaient été volées de l'église de la Vierge de Kanakaria du village Lithragomi dans la partie occupée, ont été retrouvées en la possession d'une antiquaire américaine. Après la décision de la Cour d'Indianapolis aux Etats-Unis,celles-ci ont été rendues à leur propriétaire légal, c'est-à-dire à l'Eglise de Chypre. «Le cas de I'odyssée des mosaïques, d'un monument mondial important de la culture», écrit Gallas, «représente un exemple terrifiant pour des centaines, voire des milliers, d'oeuvres d'art perdues, qui ont disparu et que l'on retrouve rarement plus tard comme objets volés,quelque part sur le marché international des antiquités». Plus de 250 églises, monastères et chapelles ont été vandalisés. La plupart d'entre eux ont été pillés, profanés ou détruits, alors qu'un grand nombre ont été transformés en mosquées après avoir été dénudés de leurs icônes et autres objets religieux. Certaines églises et d'autres lieux sacrés sont également utilisés comme étables, écuries, clubs, restaurants, centres culturels ou bien comme dortoirs ou entrepôts d'armes de l'armée d'occupation turque. Les églises qui paraissent être dans un état acceptable ne dépassent pas le nombre de dix. Les cimetières ont aussi été vandalisés et les tombes saccagées. Des sites archéologiques, après avoir été pillés, ont été abandonnés et tombés en ruines ou bien endommagés par des travaux de construction. Certains sites sont utilisés comme lieu de décharge publique ou de pâturage. En 1997, Chypre a réussi une grande victoire dans son effort de sauver ses trésors culturels du trafic des antiquaires, quand un amas de fresques byzantines, d'icônes et des mosaïques pillées ont été découvertes dans trois appartements munichois à la suite d'une rafle de la police allemande. Dans les appartements qui appartenaient à un antiquaire turc, Dikmen Aydin, on a trouvé des oeuvres d'art byzantines, d'une valeur d'une dizaine de millions de livres chypriotes, provenant des églises se trouvant dans les régions occupées depuis 1974. Dikmen a été arrêté et porté en justice à Munich pour avoir tenté de vendre des objets volés. Son cas est encore en instance. Depuis 1974 et jusqu'à aujourd'hui les monuments historiques et religieux dans diverses régions sont systématiquement détruits; des fouilles clandestines sont également effectuées. Des objets d'art ont été volés dans des musées, des sites archéologiques, des collections privées, et vendus à l'étranger par des trafiquants d'art. Les églises, symboles évidents et reconnaissables de l'identité culturelle de la région, ont été sujettes à des vandalismes violents et systématiques.   Malheureusement, ni les conventions internationales telle celle de l'UNESCO «pour les moyens d'interdiction et de prévention de l'importation et du transport illégal de biens du patrimoine culturel» de 1970 et les obligations conventionnelles de la Turquie qui en découlent par sa ratification, ni la décision de l'UNESCO de 1980 concernant Chypre n'ont été capables d'arrêter la destruction. La Turquie et le régime illégal d'occupation méprisent de manière provocante toute convention. Il est clair que la destruction continue et méthodique des monuments culturels dans les régions occupées fait partie d'une politique préméditée visant à faire disparaître toute trace de l'histoire et de la civilisation chypriotes et à transformer les parties occupées en un département turc dans le cadre d'un effort pour leur pleine turquisation.  Dans un effort pour mettre une fin au commerce illégal des icônes et d'autres objets religieux chypriotes, les Etats-Unis ont interdit le 12 avril 1999, l'importation des matériaux ecclésiastiques byzantins de Chypre qui ne sont pas accompagnés d'une permission d'exportation délivrée par le gouvernement chypriote. Egalement le Deuxième Protocole relatif à la Convention de la Haye de 1954 pour la Protection des biens culturels en cas de conflit armé (du 26 mars 1999) stipule que toute Partie occupant le territoire d'une autre Partie doit interdire et empêcher toute exportation, déplacement ou transfert de propriété illicites de biens culturels du territoire qu'elle occupe. Elle doit également interdire ou empêcher toute fouille archéologique, toute transformation, ou changement d'utilisation, de biens culturels visant à dissimuler ou à détruire des éléments de témoignage de caractère culturel, historique ou scientifique. La Turquie, pour des raisons évidentes, n'est pas signataire de ce protocole. Néanmoins l'intérêt international s'accroît de plus en plus en vue de la protection des biens culturels en danger. Le patrimoine culturel d'un peuple constitue une partie du patrimoine culturel de l'humanité. De ce fait, notre héritage culturel est mondial et appartient à toute l'humanité. Toute aide pour le sauvegarder, avant qu'il ne soit trop tard, est précieuse et la bienvenue.  Extrait des brochures de la Fédération Mondiale des chypriotes d'outre-mer Centre Culturel Elsa Triolet rue Charles Nédélec 13110 Port de Bouc